22 novembre 2004
Je veux descendre
Dabord cet Univers infini.
Puis dans cet infini, une galaxie parmi des milliards dautres galaxies.
Dans cette galaxie, la nôtre. Et dedans, un petit système solaire semblable à des millions dautres qui sy baladent.
Et dans ce petit système, une planète. Bleue. Toute petite. Presque la plus petite. Vulnérable. Fragile. Oh combien fragile.
Et sur cette microscopique petite boule quasi-invisible, depuis peu, un miracle, la Vie. Nous.
Nous, milliards dêtres vivants totalement invisibles ne serait-ce quà un tout petit kilomètre daltitude tant nous sommes petits et insignifiants. Arrivés depuis si peu de temps. Je ne sais plus quel scientifique nous expliquait que pour se rendre compte de ce que lhomme représente depuis que notre planète existe il faudrait faire une pile de feuilles A4 de la hauteur de la Tour Eiffel et nous notre temps dexistence, à nous les hommes serait représenté juste par la dernière feuille
Et depuis quon est là, cest-à-dire hier, nous navons quune seule idée en tête, quun seul objectif, quune seule obsession. Nous détruire.
Et nous y mettons toute notre énergie, toute notre bêtise et toute notre intelligence.
Nous y consacrons toutes nos richesses. Et nous y arrivons très bien.
Nous essayons tout. Guerres. Massacres. Exterminations en tout genre. Pollution. Tout y passe, la nature, les animaux, les hommes. Avec beaucoup de génie pour surtout ne rien oublier.
Et le résultat tant recherché commence à prendre forme. Mesdames et Messieurs, chers frères humains, la destruction massive de cette si jolie planète est annoncée prochainement. La machine semballe et nous ny pouvons probablement plus rien. Aucun espoir de retour. Peut-être, si nous y mettons beaucoup dénergie et de sacrifice peut-on espérer un léger ralentissement du processus irréversible
Et encore, le pouvons-nous encore, et en avons-nous vraiment la volonté ?
Alors que faisons-nous ?
Rien. On continue. On sen fout. Nous ce quon veut, cest du fric, du fric, toujours plus de fric
Pour faire quoi ? Ca on sait pas trop. Si pour pouvoir sacheter de plus en plus de trucs inutiles qui poluent chaque jour un peu plus la planète.
Et puis aussi pour voir si nous pourrions éventuellement aller polluer dautres planètes
Des fois quon ait tellement pollué la nôtre quon ne puisse plus y vivre. Cest-y pas intelligent ça, ma bonne dame ?
Nous pourrions, par exemple consacrer notre fric et notre savoir à essayer de réparer toutes les conneries que nous avons faites depuis une bonne centaine dannées, et tenter daméliorer la vie sur cette planète pour que nos descendants, nos enfants, puissent y vivre mieux et le plus longtemps possible ! Ou de limiter les dégâts ! Et bien non, nous préférons de beaucoup continuer, tête baissée, à tout foutre en lair en nourrissant lespoir que quand nous aurons fait de la terre un endroit vraiment invivable, nous pourrons toujours aller nous installer ailleurs !
Voilà pourquoi je veux descendre. Descendre de cette foutue machine qui sest emballée et que nous ne contrôlons plus. Une justice qui nest quune pure vue de lesprit,des religions qui ne servent quà nous dresser les uns contre les autres, la vie ensemble qui devient de plus en plus difficile, le profit à tout prix qui pourrit notre vie au quotidien, le bon sens qui nexiste plus, la télé qui nivelle lintelligence par le bas, les valeurs humaines et sociales de base qui disparaissent, les dirigeants qui nen ont plus rien à foutre des citoyens, une démocratie qui séffrite et dont on perçois de plus en plus clairement les carences et les limites
Y en à marre, ça devient irrespirable !
Mais bien évidemment tout le monde sen fout. Comme tout le monde se fout des innombrables cris dalarmes poussés tous les jours par ceux qui justement ne sen foutent pas, certains scientifiques ou quelques spécialistes qui, eux, savent ce que lon risque à continuer ainsi
Je veux descendre parce que nos sociétés, ceux qui les dirigent et nous même, marchons tous sur la tête. Tout le monde est devenu dingue. Les quelques valeurs humaines de base qui devraient nous permettre de vivre sereinement ensemble dans cet unique et magnifique jardin dans lequel nous évoluons sont oubliées ou bafouées. Nous ne sommes plus capables que penser fric, rentabilité, marketing, profit et à baiser la gueule de nos voisins, surtout sils sont plus faibles ou plus fragiles.
Et pour nous détendre ou pour refuser de voir la vérité en face, que faisons-nous ? Nous passons notre temps à ingurgiter goulûment dinepties de plus en plus débiles et abrutissantes à la télé ou à nous gargariser des abyssales conneries de la presse people.
Alors là, par contre on est intarissables. On sait tout. On a un avis intelligent et éclairé sur la « Ferme Célébrité », « lîle de la tentation », « Loft Story » ou la « StarAc »
Là on est vachement impliqués, on se téléphone pour savoir lequel de ces abrutis va être éliminé la semaine suivante. Et puis il ne sagit pas de rater un épisode ! Cest si captivant. Autrement plus excitant que de savoir que la moitié de la planète crève et que ce sera probablement bientôt le tour de lautre moitié. La nôtre
Mais cest indécent de parler de ces choses ! Cest vulgaire dans les dîners mondains ! On passe pour un rabat-joie ou un pessimiste déprimant. Alors que le nouveau look de Stevy, le cul de Loana, ou les crétineries dEve Angeli, ça cest top ! Ca passionne les foules. Maintenant y a même des magazines entièrement consacrés à ces événements hautement culturels. Et puis comme ça on ne pensent pas à autres choses et les hommes de pouvoir peuvent faire joujou tranquillement avec notre argent à inventer des machines à produire des choses inutiles ou encore à nous faire bouffer nimporte quoi du moment quils engraissent leurs comptes en banques en Suisse ou dans je ne sais quel paradis fiscal pendant que nous, nous nous passionnons pour les pets de Pascal Olmeta ou des crétins qui bouffent des asticots dans des îles pour montrer quils ont des couilles
Je veux descendre